J’ai beaucoup aimé l’année 2020. Aussi rocambolesque qu’elle ait pu être, en mars dernier, elle m’a soumis une question cruciale : « quand tout s’arrête, que te reste-t-il à faire? ». En début d’année 2021, je n’ai pas encore élucidé cette question et je continue d’y réfléchir avec curiosité, car grâce à elle, au cours des derniers mois, j’ai trouvé le courage de revisiter quelques croyances et de cheminer vers un monde plus calme, ce dont j’avais grandement besoin.
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« On ne désire pas une chose parce qu'elle est bonne, c'est parce que nous la désirons que nous la trouvons bonne. » – Spinoza
Durant mon enfance, et jusqu’à l’âge adulte, j’ai pratiqué la gymnastique. La gymnastique est une discipline sportive qui demande de la force, de la souplesse et de l’intensité. La performance d’une gymnaste se déroule généralement sur une période de 2 à 3 minutes seulement. Pendant ces 2 à 3 minutes, toute l’énergie de son corps et de son esprit est mobilisée à déployer tous les efforts possibles pour offrir une « performance parfaite » face aux juges qui l’observent et l’évaluent.
À cette époque où je pratiquais la gymnastique, j’ai travaillé assidument à offrir cette
« performance parfaite » pour me démarquer des autres gymnastes. Mon corps et mon esprit ont ainsi appris et enregistré une leçon qui s’est ancrée en moi : si tu mobilises tes énergies, ton corps et ton esprit à réaliser cette performance, tu gagnes. Ah oui, parce que je dois l’avouer, j’étais douée ! C’est d’ailleurs par l’expérience de la récompense et du gain que j’ai appris que c’était « bon pour moi » : je « gagnais » donc je « réussissais » et « j’étais reconnue… et aimée ». C’est comme ça, une journée à la fois et sur plusieurs années, que mon corps et mon esprit se sont entrainés à offrir la « performance parfaite » et ont finalement bien enregistré que… c’était gagnant.
J’ai donc foncé dans la vie avec cette énergie de « gymnaste » et ça a marché! J’ai eu plusieurs succès. Et je réalise, en rétrospective, que cela a grandement influencé mon mode de vie où j’avance avec cet étrange sentiment d’obligation de sprint : tout donner sur une durée limitée… parce qu’il y a certainement des « juges » quelque part qui m’observent et m’évaluent… et parce que je dois certainement me démarquer pour « réussir », « survivre » et « être aimée ».
Vous devinerez qu’à force de vivre avec cette croyance du « faire, faire vite et faire bien », je vis dans un tourbillon d’urgences quotidiennes qui s’accumulent et évidemment… je m’épuise.
« L’énergie vitale est limitée. L’esprit est insatiable. Mettre un instrument limité à la discrétion d’un maître insatiable, c’est toujours périlleux, c’est souvent funeste. Le maître usera l’instrument. L’effort intellectuel prolongé, exagéré, épuisera la vie. — Se tuer à bien faire pour l’amour de la gloire, ou périr pour un crime de la main du bourreau, cela revient au même ; c’est la mort, pour cause d’excès, dans les deux cas. Qui veut durer, doit se modérer, n’aller jusqu’au bout de rien, toujours rester à mi-chemin. Ainsi pourra-t-il conserver son corps intact, entretenir sa vie jusqu’au bout, nourrir ses parents jusqu’à leur mort, durer lui-même jusqu’au terme de son lot. »
- Tchoang-tzeu, IVe siècle av. J.-C
Passer de « faire, faire vite et faire bien » à « être, contempler et
explorer »
Comment passer de « faire, faire vite et faire bien » à …. À quoi justement? Il me semble que je ne sais pas faire autrement. Car cette croyance est si présente, si ancrée en moi que je ne sais quel autre chemin emprunter. Ça vous est déjà arrivé?
Récemment, j’ai lu ces lignes de Christophe André qui ont vraiment résonné en moi : « Le trop de quelque chose, c’est toujours un manque d’autre chose. Et l’excès génère forcément la carence ». Ces quelques lignes m’ont offert une piste pour explorer ma croyance et la questionner.
Quels sont les manques de « faire », de « faire vite » et de « faire bien », ces choses qui se manifestent « en trop » dans mon quotidien?
Est-ce qu’à trop vouloir « faire bien », j’en viens à manquer d’exploration et de curiosité? Est-ce qu’à force de trop de « faire bien », j’en viens à me perfectionner au point de manquer d’authenticité et de créativité? Et est-ce que cet excès de « faire bien » m’empêche de créer une réelle connexion avec les personnes qui m’entourent?
Est-ce qu’à trop vouloir « faire vite », j’en viens à manquer de contemplation? Est-ce qu’à force de trop de « faire vite », je ne vois plus que l’urgent et j’en oublie l’important? Est-ce que cet excès de « faire vite » m’empêche d’être ici et maintenant, dans ce que le présent a à m’offrir?
Est-ce qu’à trop vouloir « faire », j’en viens à manquer « d’être »?
Beaucoup de questions.
Peu de réponses.
Me voilà face à moi-même, avec l’envie folle de « faire, faire vite et faire bien » pour changer ma croyance.
Me voilà piégée.
Je comprends à présent que je ne peux sortir de ce piège par le « faire »… et que mes questionnements m’invitent à me dégager de ce piège autrement : être, contempler, explorer.
Je m’engage à essayer.
Sonia
P.S. Si tu as envie d’explorer, de faire quelques pas dans la direction de la transformation, on pourrait le faire ensemble dans le LABO | Leaders apprenants
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